Grosse découverte …Le folk porcelaine de Keaton Henson.
Avec ses mélodies crève-cœur et son jeu de guitare délicat, ce jeune Anglais suit les traces de Jeff Buckley et Elliott Smith.
Il est de ceux qui ont fait de leur timidité un art. L'allure frêle et maladive devient
chez lui une mode ; la fragilité émotionnelle, un credo. Depuis qu'il est tout petit,
Keaton Henson lutte contre lui-même, contre cet embarras et ces crises de panique
qui l'enferment chaque jour davantage dans la solitude. Son père est acteur, sa mère
est danseuse de ballet. Lui rêve de devenir graphiste, pour travailler dans l'ombre, et
ne croiser personne.
Mais à dix-huit ans, comme bien des adolescents, il rencontre le grand amour. Première
chanson, et une centaine d'autres, composées dans sa petite chambre de Richmond, dans le Sud-
Ouest londonien. Puis la rupture, soudaine, douloureuse, assassine. Keaton continue d'écrire,
mais ne veut voir personne. Il faudra attendre 2011 pour qu'un ami réussisse à le convaincre de
poster quelques morceaux sur Internet. Très vite, une radio anglaise repère "You don't know
how lucky you are". Pour Keaton, c'est le début de la gloire. Et des ennuis...
Qu'on ne s'y méprenne pas, le jeune Anglais que nous rencontrons dans la crypte de l'église
Notre-Dame-de-la-Croix, à Ménilmontant, veut bien jouer pour nous, mais n'accordera pas
d'interview. On avait lu toute la difficulté des journalistes du Guardian pour lui extirper - par
mail ! - quelques propos. On sait que chaque mot est une épreuve et que le mystère fait
désormais partie de lui. On ne se vexera pas. C'est à contrecoeur qu'il était sorti une première
fois de sa petite chambre de Richmond pour parler de son premier album,Dear.
Épaulé par l'entourage de Nick Cave, qui avait repéré le potentiel de cet opus, on aurait
pu penser que le mélancolique aurait gagné en confiance. Las, c'est avec autant de gêne qu'il
assure la promotion de son deuxième album, l'irradiant Birthdays. "Tout ça est très violent,
confiait-il il y a quelques mois auGuardian. Le live est une vraie lutte pour moi. Tant comme
spectateur que comme musicien. J'adore les concerts, mais ils me rendent jaloux. En fait, je n'ai
pas du tout envie de partager ma musique, avec laquelle j'entretiens une relation très intense,
avec une foule d'inconnus, souvent bruyants et bourrés. C'est comme assister à une orgie avec
sa femme." Vu comme ça...
Barbe en bataille et long manteau austère,
l’homme est du genre farouche. Plombé par
des phobies multiples et une timidité
maladive, il a d’abord communiqué avec les
journalistes uniquement par mail ou par le
biais de dessins. Le Londonien est en effet
plutôt à l’aise du crayon. Quand il ne chante
pas, il est graphiste. On lui doit entre autres
quelques pochettes de disques (Enter
Shikari, Dananananaykroyd…), et une ligne
de tee-shirts chez Topshop.